Je cours depuis...depuis...si longtemps! je cours pour échapper à la mort,pour donner du sens à ma vie,pour oublier (?) les désagréments et les coups du sort,mes comportements parfois douteux,à la limite du pénal,et avec lesquelles le souvenir me hante.Me rappelle perpétuellement ces actes qui me révulsent désormais.Je cours vers ce futur qui me happe et me ride,qui m'accélère,qui prépare mon tombeau.Je ne cours pas pour échapper à mon passé: mon passé est présent,si j'ose cet aphorisme.Il fait partie intégrante du vent qui me porte,sans espoir de retour.Le passé,disent certains,est clos: pensons à la chose présente,et oublions les aléas de jadis.Rappelons nous seulement des bons moments.Les bons moments...
Comment oublier les souvenirs qui ont gravés au fer rouge ces années où j'aurais dû être insouciant? Comment balayer d'un revers de la main le décès de ma mère? à 14 ans,ce genre d'aventure peut marquer durablement même un être équilibré! Je ne me souviens plus de quelle manière je l'ai vécu,mais plus le temps passe et plus ce souvenir me terrifie,me torture,passe et repasse dans mon cerveau trop ouvert sur le subconscient.Trop sensible,à fleur de peau.J'aimerais devenir amnésique,et ne plus savoir même qui je suis.Avoir l'inconscience du nouveau né,et se révéler à la vie toute neuve.Perdre la mémoire,mettre un couvercle dessus,éliminer ces effluves macabres qui m'assaillent aux soirs de nostalgie.
Je me souviens de ce dialogue avec un résident de la maison de retraite où je bossais.Deux jours après cette discussion il partait aux urgences.Il crachait du sang.Il n'est pas revenu.Il avait 81 ans,lisait chaque jour l'humanité,et ne voulait pas regarder la télé parce que,disait-il, "ils nous racontent mensonges sur mensonges".Il avait évidemment connu la guerre,avait fait partie de la résistance avec ses camarades communistes et libres-penseurs.Ils m'avait dit avec un sourire: " connaissez vous un seul homme de droite qui ai combattu l'armée allemande? dans la résistance? Tous ceux que j'ai connu ne juraient que par pétain et trouvaient que laval était un grand homme.Laval! ce salaud!..." Il n'a jamais retrouvé certains ce ses camarades,"vendus" par les collabos de vichy.Ils ont certainement terminés leurs pauvre vie dans le camp de neuengamme,sur la baltique."Vous savez ce que c'était ce camp? la prison des communistes,oui.Et ça arrangeait bien tout le monde.Vous pensez,des bolchéviques!"
J'ai pris conscience après ce dialogue que mon grand-père a lui aussi achevé sa vie dans ce camp.On parle sans cesse de la Shoa. On en fait des films,et surtout les médias ne cessent de nous rappeler son existence.Ne jamais oublier.Il faut croire qu'on ne doit retenir que le massacre des juifs.Mais quels ont été les pauvres hommes,les pauvres femmes et leurs enfants menés à l'abattoir? Certainement pas les classes supérieures,ils avaient déjà leurs billets pour les états unis...Tous ces humains faisaient partie de la classe moyenne ou étaient les ouvriers.Ceux là ont été gazés,humiliés,violés,torturés,brûlés.Mais cet humain,si prompt à se révolter contre ces agissements diaboliques, devient tout à coup celui qui torture quelques décennies plus tard,sur la terre sacrée de celui qui prônait l'amour.
A-t-on entendu,de la part des médias,conter le massacre des homosexuels,à l'étoile rose? les a-t-on entendu raconter la fin tragique de ces communistes dans ce fameux camp de neuengamme,lorsque les responsables savaient la partie perdue,et comment ils ont eu l'idée terrible de masser tous ces squelettes en pyjama sur des bateaux pour les lancer sur la baltique,en s'arrangeant pour que la croix gammée soit bien visible du ciel? et sachant pertinemment que tôt où tard l'aviation américaine passerait par là, et prendrait pour cible le tombeau de ces hommes?...Mon grand-père gît quelque part dans cette mer froide.
J'ai envie de m'arrêter de courir après l'improbable.La réalité est tragique,parfois.Les chimères que j'ai enfanté vivent dans un autre monde,et n'ont pas le désir de m'attendre.Je sens le bout du chemin,là où convergent toutes les routes de tous les mondes possibles.Là où aboutissent tous ceux qui fuyaient leur vie.Je vais pouvoir enfin m'y reposer,en compagnie des elfes, des fées et de tout le petit peuple...
A suivre...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire